Hyerabad, la ville du bad, celle qui nous a fait reprendre la route du nord. Pourtant cest de la que nait cette reflexion-ci. Au nord de la ville se situe un grand batiment moderne ou sont joues des spectacles Hindous. Je propose a Shoko dessayer den voir un (quitte a sen aller si on sennuie au bout de 2h puisque la duree moyenne est dau moins 5h) et nous nous rendons sur place pour quelques renseignements. On nous explique alors dans langlais approximatif du coin que le prochain spectacle commence a 17h, ce qui ne nous arrange pas du tout. Nous voila en train de tergiverser avec le type de laccueil qui a lair surprise mais content de notre presence. Il nous montre des livres et des CD. Cest alors que je mapercois que derriere une porte laterale on entend le resonnement des tambours accompagne dune voix etouffee qui chante quelque chose comme un psaulm. Parfois une personne entre ou sort et, le temps de louverture de la porte , le son se clarifie et on entrevoit une scene coloree. Sapercevant de mon interet, un homme, minvite a y entrer. Dans la penombre se devoile une salle comble devant une scene sur laquelle une dizaine dacteurs en costume traditionnel executent une sorte de rituel autour dune statue ornee de fleurs jaunes. De temps en temps le public reagit effectuant quelques movement des mains. Shoko me rejoint et bientot un Indien insite pour nous trouver des places assises, chose genante mais impossible a refuser devant linsistance du personage. Nous assistons donc a la fin du spectacle confortablement assises dans les sieges profonds du theatre. Bien sur, tout ce qui se produit sur la scene nous est etranger mais nous passons un joyeux moment a ecouter la musique et a observer les reactions des gens. Parfois lenvie me prend de tapper dans les mains avec eux mais je me retiens : le tempo, jy arrive a peu pres, le contre-temps des caves de jazz et des gospels new-yorkais, cest deja tres difficile mais alors les phrases rythmiques des Indiens cest de lordre de limpossible. Je me contente decouter. A la fin, les gens se levent, les femmes devoilant ainsi leurs saris de soie des grandes occasions et les homes leurs coupes de cheveux toutes fraiches. Tout ce petit monde se met en file (oserai-je le preciser indienne). Shoko et moi nous appretons a gagner la sortie lorsque plusieurs personnes nous invitent a rentrer dans la queue devant elles pour partager la nourriture benie. En effet, quelques metres plus loin deux bols, lun de riz epice, lautre de riz sucre au safran, nous sont tendus avec un sourire. Lexperience finit malheureusement avec un pseudo ingenieur informatitien qui nous tiens la jambe puis pretexte avoir perdu son portefeuille dans le bus pous nous reclamer 50 roupies soi disant pour prendre le bus (somme avec laquelle il pouvait faire au moins 3h de route en dehors de la ville). A ce detail pres nous sommes ravies davoir partage ce moment de culture dans un echange joyeux et gratuit.
Lespace du theatre est un espace particulier, cest la que la culture senglobe elle-meme, a la fois presente et representee, sa mise en abime revoit a des significations qui sont lespace prive de ceux qui la partagent. Le theatre espace public de celebration a symbolique forte et universelle permet dacceder un tout petit peu a lespace prive par loccurance dune celebration unique vecue individuellement autant que collectivement qui fait partie du spectacle mais nest pas le spectacle. Ces espaces qui englobent dautres espaces, ces lieux codifies qui renvoient aux significations dune culture, Foucault les appelle des heterotopies. Parmi celles-ci on connait egalement le cimetiere.
A Varanasi , les cremations me ramenent a cette pensee. A distance, nous observons les grands brancards drapes de tissus colores descendre vers le fleuve et les flames. Le bon vieux guide du routard donne quelques informations sur la ceremonie et tandis que je mapprete a le sortir pour lire les quelques lignes concernant ce spectacle a Shoko, un homme nous annonce quil ne faut pas prendre de photos. Un peu enervees puisque cest la sixieme fois quon nous le dit et quon nest pas idiotes a ce point, nous repondons un peu sechement. Le monsieur qui semble touché par ce ton agressif nous explique quil est desole mais que ca fait partie de son travail de veiller sur le lieu, quil transporte du bois pour les buchers. Il ajoute quil prefere expliquer les fonctionnement des choses aux touristes pour que ceux-ci soient respecteux et quil ne demande pas dargent puisque cest son boulot. Il donne alors tout un tas de details tres interessants sur le systeme et je len remercie a la fin du speech. Il finit naturellement par ajouter quil achete du bois pour les pauvres et que je peux acheter un ou deux kg chaque kg coutant 150 roupies. Shoko qui depuis le debut ne cache pas son scepticisme me lance un regard reprobateur. Jhesite et si javais bien reflechi je me serais souvenue quil existe des incinerateurs electriques pour les pauvres. Mais jai naturellement du mal a soupconner les gens et se servir des pauvres et des morts pour grapiller quelques roupies me parait un tel crime que je donne 50 roupies au bienfaiteur Je finis de me justifier en songeant que lhistoire etait bien racontee. Le type reclame un peu plus puis sen va devant mon refus. Jouvre le guide qui naturellement me mettait en garde contre ce genre darnaques et precise le prix du bois, bien inferieur a celui annonce, a moins bien sur que notre homme pousse la charite jusqua offrir du bois de senal aux defavorises. Quelle idiote! Je me calme en fixant rageusement les flames devant moi, soudaienement devenues les flames de lenfer devorant avidement mon voleur et menteur. Mais je suis egalement prise dune tristesse plus profonde. Shoko dit quelle est triste pour le bonhomme qui en arrive la. Je crois que cest autre chose. Cest le sentiment effrayant quavec nos gueules pales et notre curiosite insatiablem on est en train de pourrir quelque chose. En se promennant le long de leau notre spectacle est sans cesse interompu par des vendeurs de tous genre. Mais spectacle, le mot est bancal. Ce nest pas un spectacle a moins den faire celui auquel, comme au theatre, le public participle. Nous voudrions observer comme si notre presence ne changeait pas le paysage. Nous modifions sa vision bien sur, nous modifions sa valeur, nous modifions son economie. En quoi cela est-il mauvais? se demandera-t-on. Il a change au cours des siecles et il changera encore. Nul besoin detre conservateur a lextreme. Non, ce qui me gene cest dans le patrimoine quon le retrouve. Sa force est dechapper a leconomie du present. Le present doit servir a resignifier lheritage du passé et a le transpettre vers lavenir. Lorsque leconomie du present (le type qui veut arnaquer les touristes) prend le pas sur la puissance patrimoniale dune tradition (le respect de la mort), cest le moment ou ce role de passage saffaiblit. Que cet homme marnaque, cest vexant, quil trahisse les siens, c'est effrayant.
4 comments:
au coeur de l'un des plus grand problème scientifique et humain; l'observateur modifie inévitablement d'une manière ou d'une autre le sujet, rendant par la même occasion toute observation bancale.
L'Inde en est un exemple assez perturbant...
Bien vu... Plus lucide que moi en tout cas mais il est difficile de demande a un poisson de parler de l'eau. Il y a une fin a ce texte (voir mon post suivant), j'espere qu'elle te plaira un peu plus mais elle reste ethnocentriste! En tout cas elle est toujours plus optimiste preuve qu'on se plait tout de meme bien ici!
Mais c'est peut-être justement parce que la mort fait partie de la vie que l'on peut se permettre d'arnaquer les gens sur le dos des morts.
moi je me range à cette dernière remarque de bouz.
dis moi tam, c'est qui ton "bonhomme" (dans le post suivant)?
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